• Pourquoi le Melon de Bourgogne est devenu incontournable au Pallet

    28 avril 2025

Des origines bourguignonnes, un destin ligérien

Comme son nom l’indique, le melon de Bourgogne vient… de Bourgogne. Ce cépage blanc est né là-bas, et il était même un temps cultivé sur ces terres qu’on connaît aujourd’hui pour le chardonnay ou le pinot noir. Mais les aléas de l’histoire viticole ont changé sa trajectoire. Au XVIIe siècle, des gelées dévastatrices dans la vallée de la Loire ont détruit nombre de vignes locales. C’est là qu’intervient le melon : il a montré une résistance remarquable au froid et un potentiel intéressant pour les sols ligériens.

Aux alentours de 1709, une année marquée par des gelées particulièrement sévères – on parle de la "Grande Gelée" –, les vignerons de la région se retrouvaient face à un dilemme : comment replanter des vignes qui résistent aux caprices du climat ? C’est là que le melon de Bourgogne entre en jeu. En dépit de son origine éloignée, il s’acclimate parfaitement à la vallée de la Loire, et mieux encore, il sait tirer parti du terroir unique du Pays Nantais.

Un cépage taillé pour les terres du Pallet

Le Pallet, avec ses coteaux bordant la Sèvre et ses sols riches en micaschistes et gneiss, a offert au melon de Bourgogne tout ce dont il avait besoin. Ce terroir particulier joue un rôle primordial dans son identité. Mais pourquoi lui convient-il autant ?

Le melon de Bourgogne est un cépage qui aime les sols bien drainés et pauvres. Les sols du Pallet, souvent issus de roches métamorphiques, sont riches en minéraux, mais ne retiennent pas trop l’eau. Une situation idéale pour une vigne qui a besoin de s’enfouir en profondeur pour capter ses nutriments. Cette « lutte » pour se nourrir renforce les caractéristiques du cépage : fraîcheur, minéralité et acidité marquée.

Et puis, il faut parler du climat. Nos hivers doux et nos étés tempérés, avec l’influence directe de l’océan Atlantique, créent un environnement parfait pour le melon. Il mûrit assez tôt, ce qui lui permet d’éviter certains risques — comme les pluies automnales qui peuvent nuire à la qualité d'autres cépages plus tardifs. Bref, au Pallet, le melon a trouvé son Éden naturel.

Le rôle des hommes et des décisions historiques

Mais si le melon de Bourgogne s’est imposé, ce n’est pas uniquement une question de climat et de sol. Les décisions des hommes ont pesé dans la balance. À partir du XVIIIe siècle, le commerce du vin connaît un essor dans la région nantaise grâce aux ports comme Nantes. Le melon de Bourgogne, particulièrement bien adapté à la production de vins blancs secs, trouve rapidement sa place sur les marchés locaux.

Les marchands et les négociants plébiscitent ce cépage pour plusieurs raisons :

  • Sa capacité à produire en volume : le melon de Bourgogne est un cépage productif, ce qui, à l’époque, représentait un argument de poids.
  • Sa stabilité dans les caves : les vins issus de ce cépage étaient reconnus pour leur bonne tenue lors des transports, notamment sur les navires.
  • Sa neutralité : certains y voient un défaut, mais à l’époque, c’était un atout. Ce profil neutre laisse place à une expression marquée par le terroir, ce qui le rend unique selon la parcelle où il est cultivé.

Et puis, il faut bien une petite touche d’intervention humaine : certaines décisions politiques ont également joué en faveur du melon. En 1936, l’appellation « muscadet » voit le jour, et elle repose sur un seul cépage… le melon de Bourgogne. Ce label de qualité fige définitivement sa position dominante dans notre région, et plus particulièrement au Pallet.

Un cépage à la fois simple et complexe

On a souvent décrit le melon de Bourgogne comme un cépage « discret », voire « neutre ». C’est vrai qu’il peut donner des vins simples, faciles à boire. Mais au Pallet, là où les sols et le savoir-faire des vignerons font toute la différence, le melon se révèle complexe, profond. Nos sols apportent une minéralité exceptionnelle, et notre climat met en avant sa fraîcheur et sa vivacité.

Et que dire des vins sur lies ! Ce procédé, emblématique de notre région, consiste à laisser le vin en contact avec ses lies pendant plusieurs mois, parfois plus d’un an. Cela apporte des notes de brioche, de fruits secs, et une rondeur en bouche qu’on associe instinctivement aux meilleurs muscadets. Encore une fois, le melon prouve qu’il est bien plus qu’un cépage banal. Tout dépend de la manière dont on le cultive et dont on le vinifie.

Vers l’avenir, le melon reste roi

Aujourd’hui encore, c’est le melon de Bourgogne qui nous occupe une grande partie de l’année. Planter un autre cépage ? Pourquoi pas, mais on sait que c’est lui qui correspond le mieux à notre terre et à notre climat. Nos AOC (appellations d'origine contrôlée) et nos traditions ne laissent guère de place à d’autres cépages pour le moment.

Pourtant, le melon de Bourgogne a évolué avec nous. Ses vins sont moins « rustiques » qu’il y a cinquante ans. À force d’expérimentations et d’observations, on a appris à tirer le meilleur de ce cépage. Et il continue de nous apprendre des choses : chaque millésime est un nouveau défi, chaque parcelle une page blanche.

Au Pallet, le melon de Bourgogne reste plus qu’un cépage. C’est une partie intégrante de notre identité. Et tant que nos coteaux seront là, tant que nos mains lui permettront de s’exprimer, il continuera d’incarner ce coin de France où la vigne est bien plus qu’un simple paysage : elle est une histoire vivante.


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